La loi pour la transition énergétique fixe au biométhane un objectif de 1,7 TWh en 2018, 8 TWh en 2023 et vise 10% de la consommation de gaz en 2030. Aujourd’hui, la proportion ne dépasse pas 0,02%… Le gisement de biométhane est-il suffisant pour représenter un jour un carburant crédible pour les véhicules et l’injection dans les réseaux ? L’analyse de Sylvain Frédéric, directeur général de Naskeo Environnement, fabricant et installateur de méthaniseurs et membre du think tank France Biométhane.
En France, la consommation finale d’énergie en carburant pour le transport est estimée à 44,7 Mtep en 2014, soit 518 TWh/an (1). Le secteur des transports est responsable à lui seul de 27,6 % des émissions brutes françaises de gaz à effet de serre d’origine humaine pour l’année 2013 (2). Le biométhane, produit à partir de différentes sources de substrats organiques, pourrait-il fournir la totalité des besoins en carburant ? Le gisement est composé de deux grandes catégories : les déchets et les cultures agricoles, ces dernières étant elles-mêmes à segmenter entre les cultures intermédiaires, les jachères et celles déjà dédiées aux biocarburants.
Le potentiel des déchets : 180 TWh
Les premières sources à prendre en considération pour la production de biogaz sont formées des déchets organiques existants :
- la fraction fermentescible des ordures ménagères (FFOM), les déchets verts et les boues de station d’épuration représentent un potentiel de 20 TWh ;
- les déchets d’industries agro-alimentaires (IAA) et de commerce : 11,9 TWh ;
- la paille servant de litière pour l’élevage (après usage) et les menue-pailles (non récoltées actuellement) : 108 TWh ;
- enfin, les déjections d’élevage (lisier, fumiers) : 40,5 TWh (3).
Les cultures intermédiaires : 96,8 TWh
A ce gisement de résidus, s’ajoutent les cultures intermédiaires à vocation énergétiques (CIVE) qui ne rentrent pas en concurrence avec des cultures alimentaires et sont considérées comme complémentaires. En prenant une hypothèse de 5 tonnes de matière sèche par hectare (avec des semis sous couvert permanent) et une mise en culture sur 7 millions d’hectares, le potentiel atteint de 96,8 TWh.
Les jachères : 21 TWh
En 2015, la surface des jachères est estimée à 454 000 hectares. A partir de sorgho ou de maïs biomasse, en culture principale, les rendements sont de 46,4 MWh/ha/an (4). Le potentiel de production de biogaz à partir de ces cultures sur les surfaces en jachère est de 21 TWh.
Les surfaces existantes en biocarburant : 60 TWh
La surface dédiée au biocarburant (biodiesel et bioéthanol) est d’environ 1,3 million d’hectares. A 46,4 MWh/ha/an de production d’énergie à partir de cultures dédiées à la méthanisation, cela représente un potentiel de production de 60 TWh.
Les sources de substrats organiques connues aujourd’hui et leur équivalent en énergie en France représentent donc un gisement total de 358,2 TWh. En théorie, si l’on adopte l’hypothèse d’un taux de captation de 100 % de ces ressources organiques, 70% du carburant fossile consommé aujourd’hui (518 TWh/an) pourrait être remplacé par du biométhane-carburant. On peut même envisager une substitution complète, si l’on considère le scénario Négawatt. Lequel prévoit une consommation de 350 TWh pour le transport de marchandises et de personnes en 2030 et de 228 TWh en 2050.
Même s’il est bien entendu peu probable que la totalité de ces ressources organiques soit affectée à la seule production de biométhane, l’ordre de grandeur existe bien entre le potentiel mobilisable et la consommation de carburant fossile à partir de 2030, dans des scénarios réalistes d’amélioration de l’efficacité énergétique.
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1 : Service de l’observation et des statistiques (SOeS) du Commissariat général au développement durable. Bilan
énergétique de la France en 2014.
2 : http://www.developpement-durable.gouv.fr/Transports,34304.html
3 : Estimation des gisements potentiels de substrats utilisables en méthanisation. SOLAGRO-ADEME. Avril
2013.
4 Source : Ministère de l’Agriculture et de la Pêche. Production de biogaz à partir de maïs.
Source de l’article Greenunivers l Auteur Patricia Laurent l Le 8 Juillet 2016
(Crédit : Flickr/Observatoire Régional Energie Climat Air de Provence-Alpes-Côte d’Azur)