Gaz vert : la France en retard sur ses voisins

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Malgré le soutien du gouvernement et des objectifs ambitieux, la France est encore très en retard sur ses voisins européens en matière de gaz vert. Selon le deuxième observatoire réalisé par le cabinet Sia Partners pour le think tank France Biométhane, l’Hexagone ne comptait fin 2015 que 20 unités produisant du biométhane, c’est-à-dire du biogaz issu d’un processus de méthanisation puis purifié afin de pouvoir être injecté dans les réseaux.

Avec 82 gigawattheures (GWh) injectés en 2015 (mais 279 GWh de capacité annuelle installée), la France se situe à l’avant-dernier rang des 9 pays européens étudiés dans l’observatoire. L’Allemagne arrive largement en tête, avec 10.000 GWh injectés pour 190 unités, suivie par le Royaume-Uni avec 2.000 GWh et 51 unités.

carte-europe-biomethanePlusieurs freins en France

L’avance de l’Allemagne, où la méthanisation est très développée, n’est pas très surprenante. « Ce pays produit notamment des cultures dédiées à la production de biogaz, ce qui lui permet d’utiliser des matières premières homogènes et d’industrialiser ses processus », explique Cédric de Saint-Jouan, fondateur du groupe Vol-V et président de France Biométhane. L’Allemagne a même déjà diminué les aides à la filière, signe de maturité.

L’Allemagne produit notamment des cultures dédiées à la production de biogaz, ce qui lui permet d’industrialiser ses processus.

Le niveau atteint par le Royaume-Uni semble, lui, plus remarquable. « Le gouvernement britannique a introduit un tarif de rachat garanti pour le biométhane en 2011, tout comme en France », relève Cédric de Saint-Jouan. « Le succès du biométhane dans ce pays s’explique par un tarif légèrement supérieur au tarif français, mais surtout par l’autorisation, là aussi, des cultures énergétiques. »

Malgré des incitations importantes, comprenant un tarif de rachat depuis 2011 et des subventions de l’Ademe, le biométhane souffre encore en France de plusieurs freins. Les projets y sont particulièrement complexes, car seule l’utilisation de déchets est autorisée pour la méthanisation. Selon l’observatoire, 67 % des unités de l’Hexagone utilisent des déchets agricoles.

Réticence des banques

L’obstacle principal reste toutefois la réticence des banques à financer les projets, essentiellement liée aux difficultés rencontrées dans le passé par de nombreuses installations de méthanisation agricole. « Pour lever ces réticences, il faudrait prolonger le tarif garanti, aujourd’hui prévu sur quinze ans, sur une durée de vingt ans », plaide Cédric de Saint-Jouan.

Parmi les autres mesures préconisées par les professionnels, la valorisation du digestat (ce qui reste en fin de processus), aujourd’hui considéré comme un déchet : ils réclament notamment son homologation automatique pour les installations utilisant des déchets agricoles ou alimentaires, de sorte à pouvoir l’utiliser comme engrais ou le vendre sans procédures complexes.

Nombreux projets en attente

Enfin, alors que le gaz carburant (GNV) commence à se développer dans l’Hexagone, ils souhaiteraient que le GNV issu de biométhane soit considéré comme un biocarburant, et plus généralement mieux promu.

En attendant, de nombreux nouveaux projets sont en liste d’attente : ils étaient 200 début avril, selon GRDF, représentant une production annuelle de 5.200 GWh à l’horizon 2019. Selon un décompte du distributeur de gaz, 16 projets devraient entrer en service cette année et 46 en 2017. La loi sur la transition énergétique d’août 2015 fixe un objectif de 10 % de gaz vert dans les réseaux en 2030, représentant un volume de 30.000 GWh.

Source de l’article Les Echos.fr l Auteur Anne Feitz l Le 4 juillet 2016